Qui a dit que les féministes n’avaient pas d’humour…sans doute une sacrée bande de détracteurs acharnés ? Voici cinq groupes d’action féministe pour en découdre une bonne fois pour toutes avec les préjugés. Voilà , une fois de plus, la preuve que l’humour, la dérision et la parodie sont bien des caractéristiques essentielles du féminisme, quels que soient le pays ou la culture !
En pleine période Reagan, un groupe de féministes américaines font des ravages d’humour et de second degré. A coups de slogans tels que « procreation, not recreation » (pour la procreation, pas la recreation), « Eliminate the gender gap by repealing the Ladies’ vote » (éliminons la discrimination— en supprimant le droit de vote des femmes) , « Restore virginity as a high-school requirement » (exigez la virginité comme condition d’entrée à l’universit é), « Born to clean » (Née pour nettoyer ), elles ont attaqué les conservateurs, les républicains, les anti-avortement par une parodie poussée à l’extrême qui les prenait totalement au dépourvu. Et que dire de leur campagne pour supprimer l’environnement parce qu’il prend trop de place et est trop difficile à nettoyer ? Ou de leur création d’une Commission sur les Activités Anti-Féminines (clin d’œil à la Commission sur les Activités Anti-américaines du maccarthysme) ?
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The Guerrilla Girls
Avez-vous déjà remarqué que la plupart des femmes exposées dans les musées sont nues et faites de peinture à l’huile ? Les Guerrilla Girls, féministes à l’assaut du monde de l’art, l’ont dénoncé sur tous les tons, en affichant les noms des galleries et musées qui exposaient le moins de femmes, en critiquant les magazines d’art qui parlaient le moins d’artistes femmes, en résumant les avantages d’être une femme artiste (notamment ne pas travailler sous la pression du succès, ne pas devoir se partager les espaces d’exposition avec des hommes, savoir que de toute manière son art sera qualifié de « féminin », etc…). Mais leur sens de la dérision et du graphisme s’est étendu à bien d’autres sujets, comme la guerre du Golfe, la pauvreté, la politique américaine.
Elles demandent aussi un retour aux valeurs traditionnelles en matière d’avortement : avant la moitié du 19ème siècle, l’avortement était légal, même l’Eglise catholique ne l’a pas interdit avant 1869 ! Anonymes, elles se cachent derrière des masques de Gorilles qui grognent. Et vu la représentation des femmes dans le monde de l’art, elles n’ont pas fini de grogner…
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Les Reines prochaines
La musique féministe suisse existe, nous l’avons rencontrée en la personne des Reines Prochaines, groupe délirant et déluré. D’un album à l’autre elles enchaînent les chansons satiriques, féministes et politiques. « I wanna be a Butch » ou « Aline, j’ai crié » seraient déjà des chansons d’anthologie si les féministes avaient le pouvoir à la radio. Et que dire de la reprise de la chanson sirupeuse de Chris Isaac « Wicked Game », criée à tuet ête par une des anciennes chanteuses du groupe, Pipilotti Rist. Laquelle est également une artiste contemporaine de renom, comme chacune des membres du groupe qui comprend actuellement Muda Mathis, Fränzi Madörin, Gaby Streiff, Sus Zwick et Sibylle Hauert. Mais la puissance du groupe s’exprime surtout lors de leurs concerts, totalement hilarants a force d’irrévé- rances. Les performances s’enchaînent, les instruments et les voix s’échangent. Scènettes, rage comique, déguisements, flibustières. Bref, il faut les faire venir en Belgique, à toute vitesse !
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Dyke Action Machine
C’est la rencontre du graphisme et de l’activisme lesbien. C’est aussi la rencontre, en 1991, de deux graphistes lesbiennes, Sue Schaffner et Carrie Moyer qui ont pris d’assaut l’espace public avec des campagnes d’affichage provocantes et à l’allure très professionnelle. Plus de 2000 posters représentant des lesbiennes tapissaient chaque année les murs de New York et d’ailleurs. Notre préféré est bien sûr celui contre le mariage gay qui représente deux lesbiennes en robe de mariée sous le slogan : Cela vaut-il la peine de devenir ennuyeuse pour un mixer ? Le mariage Gay – Autant être hétéro. Ailleurs elles critiquent le consumérisme américain à outrance, l’invisibilit é des lesbiennes dans l’image du bon citoyen américain ou établissent une hotline pour celles qui détestent les hommes. Au bout du fil, une voix récite des extraits du Scum Manifesto de Valérie Solanas. De quoi calmer et réjouir les correspondantes. Le duo propose un site web délirant.
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The Lesbian Avengers
Les Justicières Lesbiennes, nom merveilleux pour un groupe qui ne l’est pas moins. Au-delà d’actions plus sérieuses pour la visibilité des lesbiennes ou contre la violence faite aux gays et lesbiennes, elles ont aussi recouru souvent à une bonne dose d’humour. Par exemple en pervertissant les traditionnelles chansons de Noël en versions romance gouine qu’elles chantaient dans les grands magasins lors des courses de décembre. Que pensez-vous de « Jingle Dyke » ? Lors d’une conférence de femmes républicaines pour sauvegarder les valeurs familiales, elles distribuent des flyers bourrés de conseils pour sauver un mariage : par exemple, éviter de se rendre à des réunions Tupperware où le nombre élevé des femmes pré- sentes peut engendrer l’explosion de tendances lesbiennes. Moins sur la touche de l’humour, mais plus sur celle de la mémoire, elles érigent une statue d’Alice B. Toklas à côté d’une statue officielle de Gertrude Stein, reliant enfin les deux amantes dans l’espace public. Lors des années fastes, des sections du groupe opéraient dans une dizaine de villes américaines, au Canada et en Angleterre.
I want to be a Butch
Just a Butch
Cause Butches are strong and sensitive
Butches are sexy and wonderful and powerful
but I suspect... that I am a femme…
what a nuisance !
no it’s not !
I want to be a butch...
(autre voix) Me too ! Yes ! No ?
(autre voix) Me too ! Yes ? Yes !